Les Touareg

Les Touareg

Les Touareg sont les Berbères du Sahara central. Peuple nomade de grande tradition d’élevage, les Touareg vivent depuis des temps immémoriaux sur un territoire immense qui s’étend de l’Aïr (nord du Niger) à l’Adrar des Ifoghas (nord du Mali) en passant par le Fezzan (Libye), le Tassili n’Ajjer et le Hoggar (sud de l'Algérie). Ils sont aujourd’hui séparés par les frontières instaurées dans les années 1960.

La culture touareg

Au-delà des distances et des différences régionales, une culture, des traditions et des valeurs communes forgent l’identité touareg.

Élément fondamental de cette cohésion culturelle : la langue, appelée tamahaq (à l’est : Aïr, Tassili n’Ajjer, Fezzan) ou tamasheq (à l’ouest : Adrar des Ifoghas, Hoggar). Les Touareg se dénomment d’ailleurs eux-mêmes, selon les régions, les « gens de la langue touareg » (kel tamasheq) ou les « gens de la parole » (kel awal). La langue touareg se distingue par l’emploi de consonnes euphoniques qui lui confèrent une sonorité douce et singulière. Aujourd’hui comme hier, l’amour du verbe s’exprime à travers les poèmes ou encore les devinettes – deux genres très prisés. Poétesses et poètes manient particulièrement la louange, célébrant volontiers la beauté et la bravoure des femmes nobles, le courage d’hommes valeureux et méritants. Sans oublier la complainte du nomade solitaire, grand sujet de prédilection…

Cette langue touareg possède son système d’écriture propre : le tifinagh, qui signifie littéralement « les signes ». Les 24 caractères tifinagh sont essentiellement des consonnes, certaines voyelles étant désignées par des points.

La société

La société traditionnelle touareg est organisée en tribus, l’appartenance à une tribu étant établie en référence à un ancêtre originel. Ces tribus sont hiérarchisées entre elles et se regroupent en confédérations arbitrées par un amenokal (chef).

Les familles d’une même tribu se reconnaissent donc un ancêtre commun, notion qui se perpétue notamment à travers la figure de l’amghar, ce « doyen » ou « vieux » auquel tout membre de la tribu continue de s’adresser pour recevoir des conseils avisés, débattre de décisions intéressant la communauté…

Autrefois, les tribus étaient composées de nobles guerriers, de vassaux éleveurs, de religieux, d’artisans (les « forgerons ») et d’esclaves. Guerriers valeureux, redoutés pour leurs rezzous, mais aussi grands éleveurs de chameaux (et de vaches, moutons, chèvres, ânes…), les Touareg ont détenu la maîtrise du commerce transsaharien pendant des siècles, leurs longues caravanes chargées de marchandises assurant les échanges entre l’Afrique du Nord et l’Afrique noire. Leur parfaite connaissance du désert, ainsi que leurs valeurs morales empreintes d'un fort sentiment de dignité et de fierté leur ont acquis une réputation extrêmement prestigieuse.

Aujourd’hui, le 4x4 supplante le chameau, et la société touareg, structurée depuis toujours par l’élevage, est en pleine mutation. Les sécheresses catastrophiques de 1973 et de 1984 ont ravagé le cheptel et poussé de nombreux nomades à se sédentariser, à quitter les campements pour les villages et les villes, voire à s’exiler tout à fait. Beaucoup doivent s’orienter vers de nouvelles activités, parmi lesquelles le tourisme, une manière moderne de nomadiser dans le monde actuel... « Ô désert, compagnon de ma vie », chantait Baly Othmani (1953-2005), célèbre musicien de Djanet…

La femme touareg

Les femmes jouissent à la fois d’une grande liberté, d’une grande considération et d’un statut éminent au sein de la société touareg – ce qui a pu conduire certains à parler de société matriarcale. Il faut savoir que, chez les Touareg, la filiation est établie par les femmes. De plus, sa position privilégiée attribue à la femme la transmission du pouvoir (autrefois) et celle des biens (c’est elle qui possède la tente ou la maison, le jardin dans une oasis…). La femme participe, bien sûr, aux prises de décisions dans son foyer. Elle est aussi la garante de la transmission de la culture et des traditions, de l’éducation des enfants auxquels elle dispense l’enseignement de l’écriture tifinagh et l’enseignement coranique.

Évidemment, la femme touareg est une muse idéale, source d'inépuisables louanges exprimées par la poésie et le chant.

Artisans et orfèvres : les forgerons

Les bijoux touareg, très appréciés jusque sous nos latitudes, sont inspirés par une tradition séculaire, sans cesse renouvelée sous les doigts d'orfèvres inventifs : ils sont l’œuvre des artisans, appelés « forgerons » (inadhan) car ils détiennent la maîtrise du feu.

Dans la société touareg, les forgerons travaillent le métal, le bois et les peaux (cuir de mouton, gazelle, vache, mouflon, chameau, chèvre, antilope…), notamment pour façonner les selles des chameaux (terik, pluriel : tirriken). Ils fabriquent les objets usuels, les outils et les armes, comme la fameuse takouba (épée) que chaque Touareg se voit remettre à l’âge d’homme. Sans oublier, bien sûr, les bijoux en argent, dont le plus emblématique est certainement la croix d’Agadez ou croix du Sud, teneghelt en touareg (dérivé de enghel, « verser », car les bijoux sont fondus selon la technique de la cire perdue). La croix touareg est déclinée en 21 motifs différents, chacun correspondant à une région du Niger.

Aux femmes des forgerons sont réservés les métiers de la vannerie et du cuir, et en particulier les articles de cuir ouvragés et les travaux minutieux, la création des décors, avec incisions et broderies…

Les forgerons se transmettent leur savoir-faire de génération en génération : on ne devient pas artisan, on naît forgeron.

Libres de parole, les forgerons ont un statut particulier, comparable à celui des griots en Afrique : ils servent d’intermédiaires, sont chargés de transmettre des messages, et forment un corps de poètes fort appréciés.